2012/10/22

A quoi sert la pagination sur le web ?



La lecture de la semaine provient de la rubrique “technologies” du site d’information américain Slate (@slate), on la doit à Farhad Manjoo (@fmanjoo), qui tient cette rubrique, le texte s’intitule : “arrêtez tout de suite la pagination”.

“La pagination”, écrit Farahad Manjoo, “est, en termes de design et d’usage, le pire pêcher sur le Web. Elle est la preuve d’un mépris constant et silencieux pour ceux qui devraient être la cible privilégiée des sites d’informations : à savoir les gens qui veulent les articles jusqu’au bout. La pagination persiste parce que diviser un article en deux pages peut, en théorie, doubler la place pour les publicités. Alors qu’en pratique, la plupart des lecteurs ne cliquent jamais sur la deuxième page. La pratique de la pagination est devenue tellement courante qu’on a l’impression qu’elle a toujours été la norme sur le Web.”

Or c’est faux, rappelle Manjoo. “Les premiers sites d’information ne paginaient pas, et cette pratique est vieille d’à peine dix ans, répondant à la pression de l’industrie publicitaire. Et il pourrait en être autrement, et d’ailleurs, quelques-unes des publications les plus intéressantes et les plus lues, comme BuzzFeed ou the Verge, s’en passent très bien.” De toute façon, selon Farahd Manjoo, le comptage des pages vues est une stratégie à court terme. Car sur le long terme, un design peu accueillant n’aide pas les sites à gagner de nouveaux adhérents, or le fait de gagner de nouveaux lecteurs est le but de tout site. Je suis certain, ajoute Manjoo, que si tous les sites d’informations passaient en page unique, ils récupéreraient vite ce qu’ils croient perdre. Leurs articles seraient plus partagés, et trouveraient plus de lecteurs fidèles.


Image : le tourneur de page d’Andy Brandon.

“Chaque jour, comme des dizaines de millions d’autres lecteurs innocents, je clique sur des articles qui se révèlent être des morceaux d’articles. Des papiers qui pourraient se lire sur une page exigent un, deux, trois, quatre, cinq, ou dix autres clics pour passer à la page suivante. Nous avons tous nos petites habitudes pour affronter cette prolifération des pages. Les timides font ce qu’on leur dit, cliquent et recliquent, perdant du temps et utilisent de la bande passante pour que les publicités puissent d’afficher. Les plus malins savent comment contourner le problème et cliquent immédiatement sur le bouton “single page”. Pour ma part, j’ai développé ce réflexe au pont que sur les sites que je visite souvent, mon doigt glisse presque automatiquement vers ce bouton. Quand il n’y a pas de bouton “single page”, j’ai immédiatement envie de casser la gueule du web designer.

Certains avancent qu’ils aiment que les articles soient divisés en plusieurs pages. Ils sont évidemment dingues, et leur opinion mérite à peine d’être discutée, mais faisons-le quand même. En général, leur argument est le suivant les longs articles sans coupure sont comme écrasés sur une page web. En gros, les paginer est un moyen de les rendre plus accueillants. C’est l’argument du journal qui m’emploie, Slate : un long article sur une seule page peut décourager le lecteur, la pagination le rend plus digeste. Et même, la pagination donne au lecteur une idée de la longueur de l’article. Si vous voyez que l’article compte dix pages, vous savez à peu près le temps qu’il vous faudra pour le lire.

Je ne suis pas en complet désaccord avec l’idée que ce sont là des bénéfices de la pagination. Mais je pense qu’un design intelligent peut améliorer l’apparence de longs articles sur le web. Un site comme The Verge, qui publie chaque jour de longs articles, y parvient très bien. Les longs articles y sont découpés en blocs séparés par des photos ou des éléments graphiques et chaque article possède sa propre navigation interne qui permet d’aller directement d’une partie à l’autre du texte.

Et manifestement, leurs commerciaux ont été tout de suite convaincus que ça ne poserait pas de problème aux régies publicitaires. Et c’est ce qui s’est passé. La fréquentation de The Verge est toujours en hausse et les régies ont compris que des lecteurs attentifs valaient mieux que des pages vues. Même chose avec BuzzFeed qui publie à la fois longs reportages et longues galeries photo, sans jamais les scinder. Ils peuvent se le permettre parce que leur modèle publicitaire est différent et ne repose pas sur les pages vues. Pour eux, ce qui importe c’est le nombre de clics sur la page et le partage par les lecteurs. Donner envie aux gens de partager ce qu’ils ont lu, pour attirer de nouveaux lecteurs.

“J’y crois”, dit Farhad Majoo. “En tout cas, ça vaut le coup d’essayer.”

Xavier de la Porte

“Xavier de la Porte (@xporte), producteur de l’émission Place de la Toile sur France Culture, réalise chaque semaine une intéressante lecture d’un article de l’actualité dans le cadre de son émission.

L’émission du 21 octobre 2012 était consacrée aux relations entre cinéma et jeux vidéo en compagnie d’Alexis Blanchet (@alexisblanchet) maître de conférences à l’Université Paris 3 et auteur des Jeux vidéo au cinéma.

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